Gary Hamel enseigne à la London Business School et dirige le cabinet Strategos. Il est l’auteur de plusieurs best-sellers dont « La Conquête du futur » et « La Fin du management »
Considéré par le magazine « Fortune » et « The Wall Street Journal » comme l’une des personnalités des affaires les plus influentes au monde, Gary Hamel tire à boulets rouges sur le management traditionnel, qu’il ne s’agit plus, selon lui, d’améliorer mais de réinventer. « Ce type de management est devenu un problème, non une solution ».
Il commente cinq principes clé pour un management adapté à « un monde de changement perpétuel, de compétition féroce, d’innovation débordante et d’exigences sociales ».
1 – LES VALEURS
Argent facile, cupidité, myopie, déni, complexité ont conduit à la crise de 2008 et mis à mal l’image du monde bancaire ainsi que celui des grandes entreprises et des milieux économique et politique en général, estime Gary Hamel. « Dans le monde des affaires, quand la confiance diminue, les contraintes réglementaires s’accroissent. Seul un regain d’éthique peut enrayer ce processus », observe-t-il.
Les grands groupes et banques mondiales, pour gagner la confiance de l’opinion publique, se doivent de retrouver le sens de la noblesse. « C’est une tendance de fond : les nouvelles promotions de MBA placent l’éthique de leur potentiel employeur au même niveau que leurs prétentions salariales », assure le penseur des affaires.
2 – L’INNOVATION
L’innovation aujourd’hui, c’est l’iPhone d’Apple, le produit esthétiquement parfait C’est aussi la campagne de publicité décoiffante ou encore la capacité à faire vivre au consommateur une expérience hors pair. Problème : les produits à succès et les stratégies innovantes sont vite copiés. La compétition féroce entre entreprises commande la mise en place d’un processus d’innovation constant.
Or, dans la plupart des organisations, l’innovation se produit « malgré le système » et non « grâce à lui ». « Il n’y a qu’une entreprise sur cent qui considère l’innovation comme l’objectif et la mission de chaque salarié et comme la seule stratégie durable pour créer de la valeur à long terme », déplore Gary Hamel. « Accorder bien plus de liberté aux salariés est la clef. Si l’entreprise veut de l’innovation et de l’inattendu, elle doit laisser la possibilité aux salariés de le provoquer », insiste-t-il.
3 – L’ADAPTABILITÉ
« Quand une entreprise se développe, son attention passe de l’innovation à l’amélioration et de l’exploration à l’exploitation. La discipline, la concentration et la cohérence ont la prééminence », explique Gary Hamel. Résultat : les entreprises oublient de se réinventer. Elles répètent les recettes qui ont fondé leurs succès passés, campent sur leur autosatisfaction et se laissent diriger par leur instinct de conservation et leurs rigidités mentales. « À un tel régime, même les icônes finissent par tomber dans la médiocrité. Et voilà comment expire l’excellence : GM, EMI, the « New York Times », Johnson & Johnson, Nokia, Kodak ont perdu la gniaque, ces dernière années », ponctue Gary Hamel.
4 – LA PASSION
« La plupart des managers ont le réflexe d’étouffer l’enthousiasme de leurs collaborateurs plutôt que celui d’en attiser les flammes. Pourquoi acceptons-nous que nos systèmes de management aient plus de chance de contrecarrer un exploit que de le faciliter ? », interroge Gary Hamel.
« Le problème aujourd’hui n’est pas un manque de compétence mais d’ardeur », poursuit-il en assénant que les individus doivent passer avant les institutions. « Combien de règles imposent la standardisation aux dépens de l’initiative et de l’enthousiasme, tout en délivrant de maigres bénéfices, voire aucun, en termes de performance ? »
5 – L’IDÉOLOGIE
L’idéologie du management est déséquilibrée, car elle accorde une place excessive au contrôle et à la bureaucratie, mais tout à fait insuffisante à la liberté, comme cela peut être le cas au sein d’entreprises telles que Morning Star (groupe américain transformateur de tomates). D’autres structures s’organisent d’une manière similaire : WL Gore (groupe textile américain de quelque 8.000 personnes), la société d’informatique indienne HCL Technologies, la structure coopérative Mandragon en Espagne, Grameen Bank au Bangladesh ou encore les sociétés de la Silicon Valley.
Pour Gary Hamel, les entreprises accordent à tort peu d’intérêt aux coûts invisibles suscités par les décisions trop tardives, les biais cognitifs, les préjugés dissimulés et la déresponsabilisation du personnel. Autant d’éléments qui constituent « un désavantage concurrentiel » et forment ce que Gary Hamel considère comme une « taxe de management ».
Source : le blog du manager positif